- FRANCO-FLAMANDS (ARTS)
- FRANCO-FLAMANDS (ARTS)FRANCO-FLAMANDS ARTSOn qualifie généralement de franco-flamands l’art des sculpteurs du temps de Charles V et celui des peintres travaillant à la cour de France au début du règne de Charles VI, et ce en raison de l’origine «flamande» de bon nombre de ces artistes. Il semble en effet qu’ils n’aient pas apporté une forme d’art pratiquée auparavant dans leur pays d’origine, mais qu’ils aient trouvé leur expression artistique au contact du foyer parisien.L’un de ces maîtres, André Beauneveu de Valenciennes, après avoir travaillé à Paris pour le roi Charles V, mais aussi à Malines et à Courtrai, passa au service du duc Jean de Berry. Mais, avant que ne s’élève la Sainte-Chapelle de Bourges, où le duc de Berry devait avoir son tombeau, la fondation de la chartreuse de Champmol par Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, devait faire de Dijon un important foyer d’art. L’ordonnance première du portail de l’église, le décor de l’oratoire ducal et l’architecture d’albâtre du tombeau de Philippe le Hardi, à laquelle travaillèrent Philippe Van Eram et Claus de Haine, originaire de Tournai, furent conçus par Jean de Marville, qui avait été collaborateur de Jean de Liège. Ainsi est-ce dans la tradition franco-flamande de l’art parisien que se présentaient tout d’abord les perspectives offertes par cette fondation ducale: la double appartenance n’était pas nouvelle à Dijon, puisqu’en 1358 Jeanne de Boulogne avait commandé sa sépulture et celle de son premier mari, Philippe de Bourgogne, pour la chapelle ducale de Dijon à Jean de Soignoles, imagier parisien qui avait pour aide Hennequin Arion de Bruxelles. Elle se perpétuait d’autant mieux que le duc de Bourgogne était entré en possession du comté de Flandre en 1384, à la mort de Louis de Mâle, père de son épouse Marguerite de Flandre.En 1390, Jean de Beaumetz, peintre en titre du duc, résidant à Dijon, donnait à ses panneaux pour les cellules des moines de la chartreuse un accent bien différent du style gothique international, tel qu’il fleurissait à Paris, marqué par la grâce délicate des enlumineurs dans la tradition de Jean Pucelle. La transformation devait être plus sensible encore dans le domaine de la sculpture, avec la venue à Dijon d’imagiers inscrits à la corporation des tailleurs de pierre de Bruxelles et avec le choix de l’un d’eux, Claus Sluter, pour succéder en 1389 à Jean de Marville comme «imagier et valet de chambre du duc».De même que l’on considère comme franco-flamand l’art de Jean de Liège, on peut qualifier de «burgondo-flamand» l’art des ateliers dijonnais des environs de 1400. Mais il faut remarquer que, dans l’un comme dans l’autre cas, le qualificatif habituellement employé de «flamand» est impropre, puisqu’il désigne des peintres ou des sculpteurs originaires non seulement du comté de Flandre, mais aussi du comté de Hainaut, du duché de Brabant ou du pays mosan. Le terme «Anciens Pays-Bas méridionnaux» substitué à celui de «Flandre» n’est point non plus parfaitement exact: en effet, Tournai faisait encore partie au XVe siècle du domaine royal, bien que ses évêques fussent tout dévoués au duc de Bourgogne, et Liège appartenait à son prince-évêque. Mieux vaudrait parler de «Pays-Bas bourguignons»: pour Claus Sluter et son neveu Claus de Werve, natifs de Haarlem en Hollande, comme pour le peintre Jean Malouel, originaire de Gueldre, ce cadre serait plus adéquat.Louis Courajod considérait comme «bourguignonne» la sculpture de Claus Sluter, puisque les formes nouvelles créées par son puissant génie au portail de Champmol et au Puits de Moïse s’étaient manifestées dans la capitale du duché de Bourgogne et répondaient à un désir d’embellissement de la chartreuse où le duc avait élu sépulture. Mais Sluter était, suivant l’expression de Henri David, un «novateur transplanté», et il y avait sans doute quelque arbitraire à vouloir qualifier dès l’origine de «bourguignonne» une expression plastique sans antécédent en Bourgogne par sa vigueur d’observation et sa force de suggestion qui atteint au pathétique sans recherche apparente de l’effet, bien que le grand Saint Jean-Baptiste de Rouvres — qui est en réalité une œuvre burgondo-champenoise des environs de 1300 — ait été considéré abusivement par certains comme une préfiguration de la statuaire de Champmol. Aussi Henri Drouot proposait-il d’adopter le terme de «slutérienne» pour la sculpture du XVe siècle en Bourgogne.Il semble préférable de revenir à la qualification de bourguignonne après la période de pleine activité de Claus de Werve, le continuateur direct de Sluter: vers 1425, en effet, le nouveau style était profondément implanté en Bourgogne. Cependant, la production courante des ateliers dijonnais trahira l’esprit de l’art «slutérien» en donnant aux personnages des proportions trapues, en épaississant les traits des visages, en enveloppant les corps de draperies surabondantes qui alourdiront les formes et élargiront exagérément les silhouettes. L’apport du Midi s’ajoutera bientôt à celui du Nord avec les grands imagiers qui seront appelés par le duc Philippe le Bon: tout en suivant la ligne tracée en Bourgogne par Sluter, Jean de La Huerta, originaire de Daroca, en Aragon, et Antoine Le Moiturier, d’Avignon, neveu de Jacques Morel, auront chacun des moyens d’expression leur appartenant en propre. Vers la fin du XVe siècle, un apaisement des formes, une recherche de douceur et de charme donneront un nouvel aspect à la statuaire de Bourgogne.
Encyclopédie Universelle. 2012.